ASKA débarque en accès anticipé pour mélanger survie et gestion de tribu. Préparez vos haches et vos ordres, car l’hiver vient et il ne rigole pas.
Chef de chantier, mais avec une hache
Si vous pensiez tomber sur un énième clone de Valheim où l’on passe son temps à taper sur des cailloux en solo, ASKA va gentiment vous remettre les idées en place. Ici, on incarne un chef de clan, et le mot « chef » n’est pas là pour faire joli sur le CV. L’objectif n’est pas seulement de survivre dans votre coin en mangeant des baies douteuses, mais de bâtir une véritable civilisation capable de tenir tête aux éléments. Le jeu prend le parti audacieux de mixer la survie à la troisième personne avec des mécaniques de gestion de colonie très poussées, ce qui nous change agréablement de la routine habituelle du genre. On commence certes à poil (ou presque) sur une plage, mais très vite, l’invocation de villageois via l’Œil d’Odin devient la priorité absolue pour ne pas finir en glaçon.
La grande force d’ASKA réside dans cette délégation des tâches qui s’avère, disons-le franchement, assez jouissive. Fini les allers-retours interminables pour ramasser trois branches et deux silex pendant des heures : vous assignez des rôles à vos sbires et vous les regardez bosser. Et quand je dis « regarder bosser », c’est littéral. Les développeurs de Sand Sailor Studio ont poussé le vice jusqu’à animer physiquement chaque action. Si vous demandez à un villageois de construire un abri, il va aller chercher les ressources, les transporter (réellement) sur son dos, et assembler le tout pièce par pièce. C’est une fourmilière organique qui prend vie sous nos yeux, et bon sang que c’est satisfaisant de voir tout ce petit monde s’activer pour la gloire de notre futur village.
Cependant, ne croyez pas que vous allez pouvoir vous tourner les pouces en sirotant de l’hydromel pendant que les autres triment. Le système de gestion est exigeant, voire parfois un poil capricieux. Il faut gérer les plannings de tout ce beau monde : temps de travail, temps de repos, et temps de sommeil. Si vous poussez trop mémé dans les orties (ou le viking dans la neige), le moral chute, l’efficacité avec, et c’est la débandade. Il faut constamment jongler entre l’expansion de la base et la micro-gestion des besoins primaires de chacun : la soif, la faim, et surtout la chaleur. C’est une machine complexe qui demande un temps d’adaptation, mais une fois que l’on comprend les rouages, on se sent vraiment investi d’une responsabilité de Jarl.
L’hiver n’est pas là pour enfiler des perles
Le rythme d’ASKA est dicté par une épée de Damoclès permanente : l’arrivée de l’hiver. Si dans d’autres jeux de survie, les saisons sont parfois juste un changement de palette de couleurs, ici, c’est le boss final de votre année. La progression se fait dans une angoisse latente de ne pas être prêt à temps. Les ressources se raréfient, l’agriculture devient impossible, et le froid devient une entité mortelle qui cherche la moindre faille dans vos vêtements ou vos murs. Cette pression constante donne un sens à chaque action entreprise durant les beaux jours. On ne coupe pas du bois pour le plaisir, on stocke frénétiquement en priant pour que le tas de bûches suffise à alimenter les feux quand le blizzard frappera.
L’ambiance qui se dégage du titre est d’ailleurs l’une de ses plus grandes réussites. La direction artistique, bien que tirant vers le réalisme parfois un peu terne propre à la dark fantasy, excelle dans les effets météorologiques. Quand une tempête se lève, on le sent. Le vent hurle, les arbres plient, la pluie ou la neige tombent drue et la visibilité en prend un sacré coup. Le cycle jour-nuit apporte aussi son lot de tensions, transformant les forêts accueillantes en coupe-gorge sombres où la moindre lueur de torche devient un réconfort. On est clairement sur un jeu qui veut vous faire sentir petit face à la nature, et ça marche du tonnerre.
Sauf que l’hiver n’apporte pas que le froid. Il amène aussi les invités indésirables. Les invasions, orchestrées par une mécanique liée à l’Œil d’Odin, viennent régulièrement tester la solidité de vos défenses. C’est là que le bât blesse parfois un peu : la difficulté peut connaître des pics assez violents qui risquent de décourager les moins téméraires. Se retrouver avec une colonie décimée par une vague de Draugrs et de squelettes parce qu’on a manqué de trois minutes pour finir une palissade, c’est rageant. Mais cela renforce aussi ce sentiment de « tout ou rien » qui caractérise la vie de nos ancêtres nordiques. La survie se mérite, et le jeu ne manque pas de nous le rappeler à coups de tatanes glacées.
Baston de regard et coups dans l’eau
Parlons un peu de la bagarre, parce qu’un Viking qui ne se bat pas, c’est un peu comme un repas sans fromage (ou sans viande, vu le contexte). Le système de combat d’ASKA tente de lorgner du côté des Souls-like avec une gestion de l’endurance, des esquives, des parades et des coups chargés. Sur le papier, c’est l’intention louable de proposer quelque chose de technique et d’engageant. Dans la réalité de cet accès anticipé, c’est… disons, perfectible. On sent une certaine lourdeur dans les déplacements qui, si elle ajoute au « poids » du personnage, rend parfois les affrontements un peu patauds. On est loin de la fluidité d’un Valheim ou de la précision d’un Elden Ring, il faut bien l’avouer.
Les impacts manquent cruellement de patate. On a parfois l’impression de fendre l’air ou de taper dans des sacs de sable plutôt que de trancher de la chair morte-vivante. Les hitboxes sont parfois aux fraises, ce qui donne des moments un peu ridicules où l’on prend des dégâts d’un coup qui semblait pourtant passer à trois mètres, ou inversement, nos coups d’épée traversent l’ennemi sans le faire sourciller. C’est dommage, car le bestiaire, bien que classique pour le genre (loups, squelettes, créatures des ombres), a de la gueule visuellement. Les boss, notamment, imposent le respect par leur design, mais les affronter relève parfois plus de la lutte contre la caméra et la rigidité des animations que du duel épique.
Cela dit, il y a un potentiel indéniable. Quand le système fonctionne, notamment lors des défenses de base avec vos villageois qui se battent à vos côtés (car oui, vous pouvez et devez les armer), on ressent une vraie camaraderie guerrière. Voir votre forgeron lâcher son marteau pour prendre une hache et défendre la forge qu’il a mis trois jours à construire, ça a de la gueule. Avec quelques patchs pour fluidifier les animations et ajouter du feedback visuel et sonore aux impacts, ASKA pourrait transformer ses combats brouillons en affrontements viscéraux. Pour l’instant, disons qu’on y va plus par nécessité que par pur plaisir ludique.
Technique : le drakkar prend un peu l’eau
Abordons le sujet qui fâche souvent dans les accès anticipés : la technique. ASKA est beau, c’est indéniable. Le moteur (qui semble être de l’Unreal Engine bien exploité) nous offre des textures fines, des jeux de lumière superbes à travers les frondaisons et une eau plutôt réaliste. Cependant, cette beauté a un prix, et l’optimisation n’est pas encore tout à fait au rendez-vous. On note des chutes de framerate assez inexpliquées, même sur des machines de guerre, dès que le village commence à s’étendre et que le nombre de PNJ augmente. C’est classique dans le genre, mais ça reste frustrant quand on veut juste profiter du panorama sans avoir l’impression de regarder un diaporama.
Le multijoueur, argument de vente majeur du titre (jusqu’à 4 joueurs en coop), souffre lui aussi de quelques hoquets. Si l’hôte de la partie s’en sort généralement bien, les clients (ceux qui rejoignent) peuvent subir un input lag assez désagréable ou des désynchronisations. Voir un villageois se téléporter ou un ennemi vous frapper avec deux secondes de retard, ça casse un peu l’immersion, vous en conviendrez. Les bugs de collision sont aussi de la partie, avec des ressources qui passent à travers le sol ou des IA qui restent bloquées contre un arbre comme si elles avaient oublié comment contourner un obstacle. C’est le lot de l’Early Access, certes, mais il faut le savoir avant de passer à la caisse.
Malgré ces écueils techniques, le design sonore mérite une mention honorable. Loin d’être envahissante, la bande-son sait se faire discrète pour laisser place aux bruits de la nature, renforçant ce sentiment d’isolement. Le craquement du bois, le bruit des outils, le vent… tout participe à une « ASMR de survie » assez plaisante. Les musiques, quand elles se déclenchent, sont dans le ton « viking épique mais mélancolique » qu’on attend, sans pour autant marquer les esprits à vie. C’est propre, ça fait le job, et ça accompagne bien nos longues sessions de bûcheronnage intensif.
Un potentiel digne du Valhalla ?
Au final, ASKA est une proposition hybride fascinante qui tente de marier le meilleur de deux mondes : la survie brute et la gestion fine. Si certains aspects sont encore bruts de décoffrage, notamment les combats et la finition technique, le cœur du gameplay – la gestion de cette colonie vivante – est déjà terriblement addictif. Il y a ce petit quelque chose, ce « je vais juste finir ce bâtiment avant de dormir » qui se transforme en nuit blanche, signe qui ne trompe pas sur la qualité de la boucle de jeu. Les développeurs tiennent là une pépite qui ne demande qu’à être polie.
C’est un jeu qui demande de la patience, un investissement en temps conséquent et une certaine tolérance aux bugs actuels. Mais pour ceux qui rêvent de bâtir un empire viking non pas seul, mais à la tête d’une tribu qui vit, mange et dort, l’expérience est unique. On est loin de l’arcade, on est dans le « slow gaming » où chaque victoire sur le froid et la faim se savoure. Si le studio maintient le cap et corrige les défauts de jeunesse, ASKA pourrait bien devenir une référence incontournable du genre, capable de regarder Valheim droit dans les yeux sans rougir.
En attendant, il va falloir retourner au charbon (ou au bois), car mes villageois réclament de la nourriture et il semblerait qu’une meute de loups ait décidé de venir tester la solidité de mes nouvelles portes. La vie de Jarl n’est pas de tout repos, mais elle vaut franchement le coup d’être vécue, ne serait-ce que pour voir son village s’illuminer sous une aurore boréale après une tempête apocalyptique.
Petit village viking recherche son Jarl
ASKA réussit le pari de mélanger survie classique et gestion de colonie poussée avec brio. Malgré une technique encore chancelante et des combats manquant de punch, l’ambiance et la profondeur du système de gestion des villageois en font une expérience prenante pour qui sait prendre son temps. Un accès anticipé prometteur qui a tout pour devenir grand.
Ce qu’on a aimé :
- Le mélange audacieux et réussi entre survie et gestion de colonie (The Settlers meets Valheim)
- Les villageois qui travaillent physiquement et réellement, un régal à observer
- Une ambiance météorologique aux petits oignons, les tempêtes sont impressionnantes
- La difficulté de l’hiver qui met une vraie pression sur la gestion des stocks
- Graphiquement très solide pour le genre, avec de beaux effets de lumière
- La coopération jusqu’à 4 joueurs pour gérer le clan
Ce qu’on n’a pas aimé :
- Les combats manquent cruellement de « patate » et de précision
- Problèmes de désynchronisation et de lag pour les joueurs « invités » en multi
- L’IA des villageois qui a parfois quelques ratés de pathfinding
- Une optimisation encore à revoir (chutes de FPS)
- Des pics de difficulté parfois brutaux lors des invasions
WarLegend.net a bénéficié d’une copie presse fournie par l’éditeur de ce jeu.
Aska est disponible sur PC.









